Reprenons la main sur la pêche artisanale ! Très intéressante réunion à Pont L’Abbé le 27 avril

Belle rencontre samedi 27 avril.

L’article de Ouest France :

Pont-l’Abbé. Le PCF : « La crise de la pêche n’est pas une fatalité »

Amar Bellal, membre du comité national du PCF en charge de l’écologie, candidat aux élections européennes.
Amar Bellal, membre du comité national du PCF en charge de l’écologie, candidat aux élections européennes. | OUEST-FRANCE

Initiative réussie pour les communistes bigoudens qui ont organisé samedi après-midi une réunion sur la crise de la pêche artisanale avec Louis Guirriec de la section locale du PCF (Parti communiste français), Taran Marec, responsable des Jeunesses communistes du département, et Amar Bellal, rédacteur en chef de Progressistes, auteur du Plan climat pour la France, Empreinte 2050.

Autres invités, Pierre Mollo, biologiste et chercheur, spécialiste du plancton et des membres de deux collectifs professionnels locaux, l’Interpro de Loctudy et Demain, Saint-Gué.

« Pour le Parti communiste du Pays bigouden, la crise de la pêche artisanale n’est pas une fatalité. Il prône la modification des règles et l’élaboration d’une vision ambitieuse au niveau européen et français ». Si réchauffement et dérèglement climatiques sont indéniables et impactent la biodiversité et la ressource, les militants communistes dénoncent « le pillage des océans par des mastodontes des mers, propriété de multinationales, au détriment d’une pêche raisonnée, respectueuse de la gestion de la ressource et des habitats marins. »

Les conséquences sont dramatiques pour la pêche artisanale : destruction de navires, diminution des apports sous les criées, fermetures d’entreprises de mareyage, de constructions navales, de mécanique spécialisée et licenciements.

« Nous prônons une transparence de la répartition des quotas, enjeu majeur, qui détermine la pérennité de la pêche artisanale. On peut également craindre que les instances professionnelles représentatives actuelles ne soient devenues que de simples courroies de transmission des directives décidées en amont au niveau de la commission européenne, sans concertation ni dialogue avec la base. Pourtant le savoir-faire des pêcheurs artisans fait d’eux les plus à même d’utiliser des méthodes de pêche raisonnées à faible impact et de privilégier les poissons destinés à la consommation humaine plutôt qu’à des usages industriels. Il devient vital pour les professionnels de la filière qu’ils se réapproprient collectivement leur destin au sein d’instances démocratiquement élues »


Samedi 27 avril à Pont L’Abbé MPT à 17h30 : Rencontre- débat autour de la pêche artisanale

Dans Ouest France

 

Dans Le Télégramme :

https://www.letelegramme.fr/finistere/pont-l-abbe-29120/le-pc-bigouden-organise-un-debat-sur-la-peche-artisanale-samedi-27-avril-a-la-mpt-de-pont-labbe-6571415.php

Le PC bigouden organise un débat sur la pêche artisanale samedi 27 avril à la MPT de Pont-l’Abbé

Comment sortir de la crise de la pêche ? Le PC bigouden propose une rencontre, ouverte à tous, avec des spécialistes. Rendez-vous le samedi 27 avril à Pont-l’Abbé.

Le PC bigouden propose une rencontre autour des enjeux de la pêche artisanale.
Le PC bigouden propose une rencontre autour des enjeux de la pêche artisanale. (Photo d’archives 2022 Le Télégramme/Bruno Salaün)

« Reprenons la main sur la pêche artisanale ». C’est le thème du débat organisé le samedi 27 avril 17 h 30 à la MPT centre social de Pont-l’Abbé par le PC bigouden. « La pêche est en crise, les causes sont multiples, le réchauffement et le dérèglement climatique, la dégradation des écosystèmes, la fragilité de la biomasse, le plan de sortie de flotte post-brexit, la diminution des apports sous criée, les fermetures d’entreprises de mareyage, l’inflation, le coût du gasoil, la fermeture du golfe… », expliquent les organisateurs.

En présence du biologiste Pierre Mollo

Thomas Le Gall, voix des ouvriers de la mer

Il y a un an, cet ex-juriste en droit maritime devenu pêcheur il y a dix ans a créé avec d’autres collègues du cap Sizun, en Bretagne, une association pour défendre une pêche durable et une approche décentralisée, en lien avec les acteurs du secteur.

Publié le 15 avril 2024 dans le journal l’Humanité

Julien Marsault

 

 

Thomas Le Gall a crée il y a dix ans l’association « Pêche avenir Cap Sizun », afin de défendre les intérêts des petits pêcheurs : aller à la rencontre d’élus, tenter de peser dans les prises de décision (quotas, interdictions…) ou encore valoriser leur travail auprès de la population.
© Julien Marsault

Audierne (Finistère), correspondance particulière.

Ce jour-là à Audierne, dans le Finistère, il fait gris à finir pilier de bar. Comme les précédents, Thomas Le Gall doit rester à terre. La mer attendra. Qu’importe, le quadragénaire a de quoi s’occuper. Il y a un an, lui et une quarantaine de pêcheurs côtiers ont créé « Pêche avenir cap Sizun », une association pour défendre leurs intérêts : aller à la rencontre d’élus, tenter de peser dans les prises de décision (quotas, interdictions…) ou encore valoriser leur travail auprès de la population.

« Nous, marins-pêcheurs, on est tous les jours en mer. C’est pour ça que notre parole doit être entendue, accompagnée et structurée », estime cet ex-juriste en droit maritime devenu ligneur artisanal il y a une dizaine d’années. Le phrasé est limpide avec juste ce qu’il faut de lâcher-prise. Il ne s’agirait pas de donner une mauvaise image de la profession ni de se noyer dans la langue de bois.

L’enjeu est de taille : se faire enfin une place face au puissant Comité national des pêches, l’organe chargé de représenter les intérêts de la profession depuis le début des années 1990, avec son patron, le Lorientais Olivier Le Nézet, empêtré dans les filets de l’affaire des poissons volants. Le maître-mot : la défense du chalutage et ses dérives, envers et contre tout.

Dans un milieu aux rapports de force complexes, il est devenu difficile de se faire entendre pour les petits pêcheurs. D’autant plus depuis la disparition des comités locaux en 2010 et lorsqu’on habite dans cette fin de terre, loin des lieux de pouvoir.

« Il y avait tous les ingrédients pour que ça pète »

Quelques mois plus tôt, Thomas Le Gall et une trentaine de camarades d’Audierne avaient débarqué dans la capitale bretonne pour soutenir le mouvement des agriculteurs. Au milieu des tracteurs où se pavanaient Nicolas Dupont-Aignan et une poignée de néonazis, les prises de parole de Thomas Le Gall ont détonné et capté très vite l’attention des médias présents.

« Notre but n’est pas d’apporter une réponse simpliste à des problèmes qui sont évidemment complexes, explique le Breton très mal à l’aise face à la prédominance des discours d’extrême droite dans sa profession. Pour moi, les solutions sont à trouver au niveau local. L’idée, c’est de structurer notre parole, de montrer qu’on est crédibles. Il y a quelque chose de très démocratique là-dedans, avec la volonté de s’émanciper. »

Le besoin de canaliser ce discours lui est apparu il y a un an, lors d’une manifestation de pêcheurs entachée par l’incendie de l’Office français de la biodiversité à Brest. Interdiction de pêche dans les aires marines protégées, impatience quant au paiement des aides gazole, plan de sortie de flotte… « Il y avait tous les ingrédients pour que ça pète. »

Si, au contraire d’un Olivier Le Nézet, lui ne s’oppose pas frontalement aux organisations de protection environnementale comme Bloom, Thomas Le Gall souhaite avant tout faire entendre la voix des ouvriers de la mer. « Nous n’avons pas besoin de ventriloques », estime celui qui défend une pêche durable et une approche décentralisée en lien avec les acteurs du secteur (militants, scientifiques, élus…).

La défense d’un mode de vie

Le sociologue et cinéaste Fabien Clouette connaît bien les rapports de force dans ce milieu de marins, notamment en Bretagne : « Il y a une forme de conscience, à l’échelle locale, que l’intérêt des petits pêcheurs n’est pas le même que celui des gros chalutiers. » La démarche de Thomas Le Gall rappelle ainsi celle d’un autre ligneur breton très investi dans leur défense, Gwen Pennarun, ou encore l’association de soutien à la pêche durable Pleine Mer.

Pour le chercheur, Audierne est l’exception qui confirme la règle. Ici, la criée se porte bien, au contraire d’autres ports bretons. La valorisation du métier et des produits de la mer perdure malgré les difficultés économiques. « Nombreux sont les pères qui embarquent leurs fils à bord de leur ligneur pour transmettre le métier puis le navire », écrivait-il par exemple dans sa thèse, « Devenir pêcheur dans le sillage du capitalisme » (2019). Une dynamique qui favorise l’émergence de ce type d’initiative.

C’est d’ailleurs le cas de Thomas Le Gall, dont la famille travaille dans le milieu depuis plusieurs générations. Plus qu’un métier, lui y voit aussi la défense d’un certain mode de vie : « Par-delà le port, par-delà les marins, il y a toute une communauté derrière. C’est un marqueur d’identité, historique, qui renvoie à un imaginaire auquel tout le monde est attaché. On ne voudrait pas voir ce port sans marins-pêcheurs. Politiquement, ça suppose de ne pas concevoir les choses uniquement comme la défense d’une corporation mais comme quelque chose de plus vaste. » Le nom du navire de son grand-père ? Le Jean-Jaurès. Ça ne s’invente pas.

Publié dans l’Humanité le 27 mars 2024

Européennes 2024 : à Loctudy, les pêcheurs bretons tentent de survivre à l’Europe libérale

Léon Deffontaines, tête de liste PCF, et Fabien Roussel, secrétaire national, sont partis à la rencontre de la filière halieutique, frappée par une crise similaire à celle des agriculteurs. Ils ont ensuite tenu meeting à Quimper.

Politique

5min

Mis à jour le 27 mars 2024 à 18:18

Diego Chauvet

Rencontre de Leon Deffontaines et Fabien Roussel avec des pécheurs du Finistère pour la campagne des européennes 2024.
Guillaume Saligot / Ouest-France MaxPPP

« J’ai fait mon apprentissage sur ce bateau de mes 12 ans à mes 17 ans », raconte Julien Le Brun à Léon Deffontaines, alors que les flots les secouent tous les deux, lors d’une sortie en mer. Cet armateur de 42 ans a repris ce chalutier qui a le même âge que lui. Puis le jeune apprenti pêcheur a pris de la bouteille, et a acheté huit autres navires. Celui qui fend les eaux sous leurs pieds part tous les matins à 5 heures, pour être de retour dans le port de Lesconil à 18 heures chargé de langoustines.

« Avec un bateau de cette taille, il faut en faire 15 tonnes dans l’année. C’est ce qu’on a fait l’an dernier. Les bonnes années, on peut en faire 20. » Une quantité nécessaire pour rentabiliser les sorties en mer, « à condition que le prix du gasoil n’explose pas », précise Julien. 42 ans, c’est vieux pour un chalutier au regard des normes requises. Il faudrait investir des centaines de milliers d’euros pour le moderniser.

L’Inizan, puisque c’est son nom, a bénéficié de quelques améliorations techniques, bien sûr. « Autrefois, il fallait quatre à cinq personnes pour une journée de pêche. Aujourd’hui, on part à deux », explique Julien. Mais le renouvellement de la flotte reste un véritable défi pour les pêcheurs bretons. « Il faut qu’on cherche tous les leviers pour aider la filière à changer ses navires », note le candidat communiste aux élections européennes. « On est encore à l’ère de la 2 CV, et l’État nous impose les normes de la dernière Mercedes », résume un autre pêcheur…

La filière halieutique menacée de disparition

Ce jour-là, le 26 mars, Léon Deffontaines est accompagné du secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, dans le pays bigouden, au sud-ouest de la Cornouaille finistérienne. Leur visite démarre sur le port de Loctudy, où les attendent les professionnels de la filière halieutique (l’exploitation de ressources vivantes aquatiques), organisés au sein du Collectif pour le maintien de l’activité portuaire à Loctudy.

Car les nombreuses difficultés auxquelles ils sont confrontés menacent la survie même de leur activité dans la région (300 emplois). « Nous, nous sommes des artisans. On n’ira pas vendre des saucisses à Strasbourg ! » lance ainsi Bruno Mourrain, mareyeur (revendeur) local. La saillie peut sembler logique. Elle tient pourtant du défi face au marché organisé par l’Union européenne. Marie Le Guen, présidente de l’association Demain Saint-Gué, cite un exemple : « Nous n’avons pas de quotas pour les maquereaux. On n’a pas le droit d’en pêcher. »

Les pêcheurs de Loctudy observent donc des bateaux étrangers pêcher ces poissons juste sous leur nez pour les ramener en Écosse, où ils sont conditionnés puis renvoyés à la vente… en France. « On achète en Écosse, alors qu’on a des maquereaux juste devant nous. » « Et les palangriers ont peur parce qu’ils ont épuisé leur quota de lieu jaune, explique également Marie Le Guen. Le problème, c’est qu’il y a toujours du lieu jaune. Résultat, quand ils en attrapent, ils les rejettent morts à la mer. On gaspille du poisson à cause de ces quotas… »

« C’est la guerre des prix »

Les professionnels de la filière halieutique sont par ailleurs confrontés aux effets des traités de libre-échange. Des églefins venus d’autres mers sont vendus 12 euros le kilo, contre les 14 ou 15 euros des pêcheurs bigoudens. « Dans des plats de paella conditionnée, on va retrouver des moules du Chili », souligne Guillaume Nicolle, lui-même mytiliculteur et vice-président de l’association interprofessionnelle.

« C’est la guerre des prix », résume-t-il. Avec des conséquences : les jeunes tournent le dos à la profession, des bateaux sont envoyés à la casse, et remplacés par des subventions. « Il faut des années pour assurer la transmission », souligne Marie Le Guen. « Moins il y aura de marins, moins il y aura de savoir-faire. Et un jour, on ne pourra plus redresser la barre. »

Pour Léon Deffontaines et Fabien Roussel, cette visite a un air de déjà-vu, même si c’est leur première parmi les pêcheurs dans le cadre de la campagne des européennes. « Ça rappelle clairement la situation des agriculteurs », résume le secrétaire national du PCF. Avant de rejoindre une réunion publique qui a rassemblé 400 personnes à Quimper, Léon Deffontaines formule de premières propositions.

Mardi 26 mars : Rencontre avec les acteurs de la filière halieutique bretonne et du Pays Bigouden à Loctudy

Organisée conjointement par la section PCF du Pays Bigouden et par l’interpro de défense des métiers de la filière pêche dans le Pays Bigouden, de nombreux armateurs, patrons pêcheurs, acteurs et porte-paroles de la filière ont eu un échange très chaleureux avec Léon Deffontaines et Fabien Roussel. Ils étaient accompagnés par Louis Guiriec de la section du pays bigouden, des candidats aux européennes du PCF Amar Bellal et Taran Marec, Gladys Grelaud, conseillère régionale, et Gérard Lahellec, sénateur, Guenola Le Huec, secrétaire départementale du PCF Morbihan et élue, Ismaël Dupont, conseiller départemental et secrétaire départemental du PCF Finistère, les deux amis élus de l’opposition Christine Corfmat, et André Flament et de Maryse Rousseau, secrétaire de la section PCF du Pays Bigouden. De nombreux journalistes de la presse écrite et de la télévision couvraient cet événement.

Une cinquantaine de militants communistes bigoudens ont accueilli ensuite Léon Deffontaines et Fabien Roussel sur le port de Loctudy, pour une crêpe et un coup de cidre sous le barnum, pour une rencontre conviviale prolongée avec les patrons de pêche, avant que Léon Deffontaines ne prenne lui-même la mer à bord d’un chalutier à Lesconil.

La journée s’est poursuivie le soir, par un meeting politique régional à Quimper, en présence de 450 personnes.

          

      

     

Quelques images

 

Contribution de la Section du PCF du Pays Bigouden au débat sur la situation de la filière pêche

L’impasse dans laquelle se trouve la filière pêche aujourd’hui est la parfaite illustration des conséquences néfastes du TCE (traité constitutionnel européen) que les Français ont largement rejeté en 2005 mais qui a néanmoins été adopté en 2008 sous le nom de Traité de Lisbonne par le parlement sous la présidence de N Sarkozy et ce contre l’avis du peuple français.

Ce traité, actuellement en vigueur, met en avant le sacro-saint principe de la concurrence libre et non faussée en vertu duquel un Etat ne peut financer un secteur d’activité économique donné. Continue reading « Contribution de la Section du PCF du Pays Bigouden au débat sur la situation de la filière pêche »

Pays Bigouden : la pêche refuse de sombrer.

Au Guilvinec, la flotte de pécheurs refuse de couler
Symbole de la pêche côtière, ce port du Finistère a vu, ces dernières semaines, de nombreux bateaux partir à la casse. Les conséquences d’un énième plan de sortie de flotte appliqué à un secteur qui peine à trouver une dynamique de long terme.

Publié le Jeudi 6 juillet 2023 dans l’Humanité Magazine, Julien Marsault

À l’approche de l’été, un pêcheur décharge sa cargaison après une virée au large des côtes bretonnes. Le geste est rapide, mécanique. Le poisson frais, appétissant. Son camarade remonte ensuite les caisses vides à l’aide d’une poulie. Ces kilos de marchandises sont ensuite vendus à quelques mètres de là, sur les étals de la poissonnerie du coin.

Bienvenue au Guilvinec, emblématique port de pêche et de plaisance de Bretagne. Aux beaux jours, nombreux sont les touristes qui viennent profiter de l’endroit. On y déguste une galette au blé noir, on s’y émerveille de la pureté de l’air marin, on y achète quelques langoustines pour l’apéro. Jusqu’à quand ?

Ces dernières semaines, les lieux sont moins fréquentés que d’habitude. Une vingtaine de navires vont finir en pièces détachées sur un chantier de déconstruction navale à Brest, dans le cadre du plan d’aide individualisé (PAI). Mis en place par le gouvernement fin 2022, celui-ci vise à soulager le secteur des conséquences négatives du Brexit, comme la perte d’activité. L’idée ? Que les pêcheurs affectés soient accompagnés pour se séparer de leurs navires vieillissants. En échange, ils seront indemnisés mais ne pourront acheter de nouveaux navires avant cinq ans. Une sorte de départ anticipé, sans possibilité d’investir à court terme.

Inquiétudes pour la jeune génération
C’est le cas du chalutier « Men Ar Groas », navire d’une vingtaine de mètres destiné à pêcher en haute mer. De la cabine de son bateau désarmé, Stéphane Cadiou y voit une manière d’améliorer son train de vie de jeune retraité. « Pour moi, c’est une opportunité, la cerise sur le gâteau. C’est un bateau qui, autrement, serait parti en Afrique pour 50 000, peut-être 80 000 euros. »

La flotte bretonne se voit encore réduite, après les plans de sortie des années 1990 et 2000 qui l’avaient déjà fortement impactée. Si la liste complète des bateaux qui vont être détruits ne doit être connue qu’à la fin de l’été, on sait déjà qu’une majeure partie concerne la Bretagne et particulièrement le Finistère. D’autres régions sont touchées, dans des contextes parfois bien différents. Dans les Hauts-de-France, par exemple, on déplore le peu de dossiers acceptés, malgré la situation précaire de certains pêcheurs.

Non pas que tous soient fortement impactés par le Brexit. « On va encore régulièrement dans les eaux britanniques, plusieurs jours, plusieurs semaines dans l’année, témoigne Gwenael Le Floch, capitaine du chalutier “Damoclès”, lui aussi concerné par le PAI. On a nos licences, ce n’est pas le souci. En 2026, on va faire face à une réduction des quotas britanniques, de l’ordre de 25 %. Et ça, ça risque de faire mal. »

La rentabilité de l’activité n’est simplement plus au rendez-vous. Avec l’augmentation du prix du fioul et les difficultés de ces dernières années (pandémie, mouvements sociaux, baisse de la consommation, etc.), toute aide financière est bonne à prendre. Mais le futur retraité est surtout inquiet pour l’avenir des plus jeunes, comme Jean- Baptiste Goulard, 40 ans.

« Le même modèle économique depuis 40 ans » 
Rencontré lui aussi sur le port du Guilvinec, le chef d’entreprise est dans une dynamique bien différente de ses aînés. Sur ses quatre chalutiers, deux partent à la casse. La moitié de ses 24 salariés vont être impactés. « Le PAI est un tremplin pour nous permettre de réinvestir, estime l’entrepreneur, qui espère pouvoir bientôt faire évoluer son activité. Aujourd’hui, il faut arrêter de travailler avec de vieux outils et se projeter vers quelque chose de nouveau. » Mais pas question d’aller vers une pêche dite artisanale, jugée pas assez rentable.

Derrière lui, son mécano, cigarette roulée à la main et tatouages aux contours incertains, termine de désosser l’un de ses engins. « Le tort de la profession a été de rester sur de l’acquis pendant trop longtemps. On est sur le même modèle économique depuis quarante ans ! » développe Jean-Baptiste Goulard. C’est-à-dire un soutien accru aux navires de taille intermédiaire (16-25 mètres) comme le sien, très gourmands en énergie, au détriment de bateaux plus petits et vertueux. La fin d’une époque ? Quoi qu’il en soit, les effets de la sortie de flotte actuelle ne se feront vraiment sentir qu’à la rentrée, période à laquelle les produits de la mer se vendent généralement le mieux.

En attendant, au Guilvinec, cette crainte de l’avenir ne s’arrête pas au métier de pêcheur. Ce jour-là, les locaux du chantier naval Hénaff sont quasiment vides. L’entreprise familiale, spécialisée dans les navires en bois, vit des mois difficiles. Les investissements dans des bateaux neufs se font rares. La propriétaire des lieux, Pauline Hénaff-Jezequellou, explique « faire face à une baisse de 30 % de (son) activité. En ce moment, on ne fait que de la petite réparation. Et encore, quand les pêcheurs y sont obligés » !

À l’hôtel de ville, on s’inquiète aussi de l’impact sur le tissu économique local. Le maire, Jean-Luc Tanneau, a peur « de passer d’une commune avec des ouvriers, des marins pêcheurs, à une ville avec des gens qui viennent de la région parisienne et ont un fort pouvoir d’achat. Il n’y a qu’à voir pendant les vacances le nombre de Porsche et de Mercedes »… L’ancien chef d’entreprise et soutien de Nicolas Sarkozy « ne souhaite pas que Le Guilvinec devienne La Baule ou Saint-Tropez. On veut rester authentiques ». La crainte d’une gentrification à marche forcée où la ville ne conserverait que l’aspect touristique et historique de la pêche.

L’ancien pêcheur et élu aux affaires maritimes Daniel Le Balch redoute de ne pouvoir aider la filière sur la durée : « Les bateaux qui viennent au port, c’est du concret. Ça fournit de l’emploi pour les forgerons, les peintres, les charpentiers. » Le maire demande, lui, « à ce que l’État soit assez vigilant pour bien accompagner les petites entreprises. À notre niveau, on les reçoit, on transmet ce qu’ils nous disent au député, au sénateur, au préfet ».

L’inquiétude du secteur s’est cristallisée lors d’une importante grève des pêcheurs, fin mars, très suivie en Bretagne mais aussi sur tout le territoire français. Des ports se retrouvent alors bloqués en signe de protestation contre le plan d’action « pour une pêche durable et résiliente » de la Commission européenne. Après avoir mis de l’huile sur le feu en s’attaquant à une prétendue interdiction du chalutage dans les aires marines protégées, le secrétaire d’État à la Mer, Hervé Berville, s’est empressé d’apporter son soutien à la filière.

Une faible représentation syndicale
Une unité de façade ? C’est l’avis du sociologue et cinéaste Fabien Clouette, qui analyse depuis des années les luttes et rapports de force au sein de la pêche bretonne. Pour lui, il faut d’abord cesser de faire croire au grand public que la filière est un secteur homogène. « Il y a une énorme diversité de bateaux et de pêcheurs. Il n’y a pas un navire qui ressemble à un autre, qui travaille de la même manière, et il n’y a pas un pêcheur idéal qui ressemble à tous les autres. »

Au Guilvinec, des armements d’une demi-douzaine de navires et de centaines de salariés comme La Scapêche, la flotte de l’enseigne Intermarché, côtoient des entreprises familiales de petite taille. Si tous sont concernés par l’actuel plan de sortie de flotte, la marge de manœuvre pour faire face à un tel choc est bien différente. Et les intérêts des uns viennent souvent se heurter à ceux des autres, et ce depuis des générations.

Lutter s’avère dès lors compliqué. Contrairement aux agriculteurs, les pêcheurs n’ont pas un répertoire d’actions très développé. La faute notamment à une faible représentation syndicale. Pour le sociologue, les acteurs de la filière peinent à se préparer aux transitions du secteur, comme la disparition de certaines espèces, mais sont plutôt dans une optique de repli sur soi. « Plus on va dans ce sens, plus on se dirige vers un mode de pensée identitaire, analyse Fabien Clouette. À partir du moment où on touche à de tels arguments, ceux qui vont réussir à les mobiliser, c’est l’extrême droite. »

Enjeux écologiques grandissants
Pas étonnant que les attaques contre Bruxelles soient récurrentes dans le milieu. Dans le port du Guilvinec, sans forcément aller jusqu’à soutenir ouvertement Marine Le Pen ou Éric Zemmour, certains pêcheurs ne cachent pas leur rancœur face aux décisions de l’Union européenne : trop d’interdictions, pas assez d’aides, une concurrence déloyale… Une posture entretenue par le gouvernement et qui n’est pas sans rappeler celle de leurs homologues britanniques. Sept ans après le vote fatidique de la sortie du Royaume-Uni, les regrets sont dans toutes les têtes.

Au Guilvinec comme ailleurs, les défis à relever semblent insurmontables. En plus des difficultés économiques, contrairement à d’autres métiers de la filière, celui de pêcheur peine à recruter. Pourquoi prendre le risque d’aller en mer, de se tuer à la tâche, alors qu’on peut toucher un salaire similaire à terre ? Comment convaincre une banque de financer une activité difficilement rentable ? Si des initiatives existent, comme l’aide à l’installation des jeunes de la région Bretagne, financée par l’UE, celles-ci ne dissipent pas les inquiétudes.

Le manque d’une réelle volonté politique au sommet de l’État apparaît comme un autre problème majeur. Les annonces contradictoires et populistes du secrétaire d’État à la Mer, Hervé Berville, sont perçues comme d’innombrables campagnes de communication sans réelle ambition. Son soutien au chalutage de fond et à la pêche industrielle plus tôt dans l’année contredit ce qu’il prônait quelques mois auparavant : la préservation de l’écosystème marin. Celui-ci a même été visé par une plainte en justice, classée sans suite, émanant de l’association de protection des océans Bloom, l’accusant de « mensonges » et d’avoir provoqué la colère des pêcheurs grévistes qui a mené à l’incendie de l’Office français de la biodiversité de Brest, fin mars.

C’est que les enjeux écologiques sont grandissants. Pour préserver la vie marine et l’activité économique, certaines organisations mettent en avant depuis longtemps la nécessité de privilégier une pêche de petite taille, vertueuse, ou encore celle de bannir les chalutiers géants néerlandais, symbole d’un capitalisme maritime exacerbé.

Chez Bloom, on craint que le modèle actuel ne se détériore encore plus. Que la concentration des licences de pêche entre les mains d’un petit nombre d’acteurs ne s’accroisse. « Il faut une répartition plus juste des quotas et une meilleure transparence, estime Laetitia Bisiaux, chargée de projet. Ensuite, nous souhaitons que l’argent du Brexit aille aux personnes qui en ont vraiment besoin. Détruire des bateaux, ce n’est pas souhaitable socialement. Et si, en plus de ça, c’est pour toujours pêcher de la même manière… »

Un avis partagé par Fabien Clouette : « On n’a pas donné et on ne donne pas les moyens aux pêcheurs de s’adapter. Pour que, le jour où on ne pourra plus chaluter, pour toutes les raisons qu’on connaît aujourd’hui, ils puissent pêcher autrement. »


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Soutien aux pêcheurs et à toute la filière pêche

Le Comité de Section  PCF du Pays Bigouden vous propose de soutenir les pêcheurs et toute la filière pêche, poumon économique de notre territoire, en participant  au rassemblement   sur le port de Lesconil  le vendredi 31 MARS à 18 h 30.

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Ainsi que nos articles précédents sur ce sujet